La petite messe solennelle
La petite messe solennelle est écrite à l’origine pour quatre solistes, chœur mixte, deux pianos et un harmonium. Ce faible nombre d'exécutants contraste avec la dimension des formations utilisées à cette époque pour interpréter les grandes œuvres de musique sacrée. C'est ce qui a valu à cette messe le qualificatif de petite alors que c’est une vaste partition où les vocalises théâtrales voisinent avec les hommages d’un musicien cultivé aux vieux maîtres du XVIIème siècle italien. En 1867, Rossini orchestre sa messe pour un effectif instrumental beaucoup plus important « pour ne pas laisser à d'autres le soin de le faire ».
Cependant, Prélude a fait le choix d’une orchestration originale arrangée par Carlos Fassino, qui ajoute au piano et à l’harmonium de la version originelle un violoncelle, deux clarinettes et un cor, ce qui conserve à l’œuvre sa résonance première tout en l’enrichissant.
C'est à la demande du comte Alexis Pillet-Will, pour son épouse Louise, que Gioachino Rossini compose en 1863 la Petite messe solennelle. Rossini âgé alors 71 ans a officiellement pris sa retraite depuis 34 ans. Il adresse au « Créateur » une dédicace en forme de boutade : « Bon Dieu. La voilà terminée cette pauvre petite messe. Est-ce bien de la musique sacrée que je viens de faire ou de la sacrée musique ? J'étais né pour l'opera buffa, tu le sais bien ! Peu de science, un peu de cœur, tout est là. Sois donc béni et accorde-moi le Paradis . »
Sur la page de garde de son manuscrit, Rossini tient à préciser : « cette petite composition est hélas ! le dernier péché mortel de ma vieillesse ». Cette évocation d'un « péché de [sa] vieillesse », dont Rossini écrit que cette Petite messe solennelle serait « le dernier », renvoie à un ensemble d’œuvres diverses composées tardivement dans sa vie et réunies sous le titre Péchés de vieillesse.
L'œuvre est créée le 14 mars 1864 dans la chapelle privée de l'hôtel particulier du comte et la première audition publique a lieu un an plus tard, le 24 avril 1865. La réception de l’œuvre est mitigée. Le critique musical Filippo Filippi ne tarit pas d'éloge :« Cette fois, Rossini s'est surpassé lui-même, car personne ne saurait dire ce qui l'emporte, de la science et de l'inspiration. La fugue est digne de Bach pour l'érudition. ». En revanche, Verdi est beaucoup moins enthousiaste :« Rossini ces derniers temps, a fait des progrès et a étudié ! Étudié quoi ? Pour ma part, je lui conseillerais de désapprendre la musique et d'écrire un autre Barbier. »
Après sa création, la partition ne ressortira pas du vivant de son compositeur. À une époque où la musique chorale a pris des dimensions énormes, la Petite messe dans sa version première tranche par sa formation restreinte, faisant référence pour certains musicologues à la musique de Palestrina et de Haydn et préfigurant celle de Fauré et de Poulenc.
E.J